Les racines de la musique arabe et du flamenco
Faustino NúñezLe chant flamenco a un arôme oriental que l'on peut apprécier dès la première écoute, mais il est difficile de mesurer l'apport des cultures de l'Orient dans le flamenco. Le plus simple est de penser que c'est dû à l'héritage arabe dans la culture andalouse, évident dans l'architecture par exemple, même dans la langue, mais dans la musique ? Est-il possible de déterminer objectivement et sans préjugés ou déductions plus ou moins fondées, dans quelle mesure la musique andalouse, et plus particulièrement l'art populaire que nous connaissons sous le nom de flamenco, est un produit de la présence musulmane pendant huit siècles de domination arabe ? On peut entendre les similitudes entre les chants orientaux d'origine arabe et le chant flamenco dans les mélismes étendus des malagueñas ou seguiriyas. Il y a aussi l'harmonie exotique de la guitare et même certains mouvements de main dans la danse qui pourraient avoir un précédent dans les traditions des pays musulmans. Bien que nous puissions également considérer les influences en sens inverse, pourquoi ne pas nous demander dans quelle mesure ces traditions n'ont pas quelque chose, ou beaucoup, d'influence andalouse, étant donné la diaspora causée par l'expulsion des morisques au début du XVIIe siècle ? Et si l'on parle de la présence orientale dans le flamenco, il ne faut pas oublier l'apport sépharade, les nombreuses mélodies à saveur orientale cultivées par les Juifs de Sépharade, sédimentées depuis des siècles dans le folklore espagnol et en particulier dans le folklore andalou. Pour sa part, le compositeur de Cadix Manuel de Falla a insisté sur le fait que l'aspect oriental du flamenco est dû à la pratique liturgique byzantine, antérieure à la domination arabe de la péninsule ibérique, alors imprégnée de la tradition judaïque dont elle émane. Profitant de la rencontre avec le chercheur Amin Chaacho, nous proposons une perspective qui n'a pas été abordée par les spécialistes du flamenco : Et si l'orientalisme flamenco était le produit de l'intention plus ou moins consciente d'une série de cantaores des premières décennies du XIXe siècle, les pionniers du cante jondo, de donner naissance à une musique qui répondrait aux aspirations des visiteurs étrangers qui, depuis le XVIIIe siècle, venaient sur les terres d'Andalousie à la recherche d'un exotisme perdu dans la vieille Europe ? Cette conférence apportera des réponses à cette question et à d'autres questions sur ce sujet passionnant.